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Le thuya, son rôle dans le bâti de La Casbah d’Alger

En vadrouillant dans les artères sinueuses et étroites de La Casbah d’Alger, un objet attire l’attention des visiteurs. Il s’agit du bois. Il fait partie du décor.

Le thuya de Barbarie est l’une des variétés de bois utilisées dans les anciennes constructions de la cité des Beni Mezghenna. Il est présent et visible partout. Ses rondins sont employés sur et à l’intérieur des murs construits à l’aide de la terre et de la pierre. Ils sont visibles sur les toits, les auvents, les balustrades des escaliers et les fenêtres des anciennes maisons et douerate.

Il fait partie des trois éléments employés abondamment dans l’édification des bâtisses du Vieil-Alger, aux côtés de la pierre et du sable. Il est présent également dans les superbes villas néo-mauresques édifiées sur les hauteurs d’Alger – entre le milieu du 19ᵉ siècle et 1930 – par des hiverneurs anglais. Ceux-ci venaient en masse en Algérie en hiver afin d’échapper au froid rugueux de leur pays.

«C’est dans le nord de l’Afrique que le thuya prend son plus beau développement et acquiert au plus haut point, les qualités qui le font rechercher des marqueteurs et des ébénistes», lit-on dans la revue française Mémorial de 1871.

«Parmi les bois propres à l’ébénisterie que fournit l’Algérie, le thuya est un de ceux qui, par son incorruptibilité, par la finesse de son grain, par l’éclat et la richesse de son veinage et de ses mouchetures, mérite d’être placé au premier rang», selon la revue.

Ce bois est connu du temps des Romains et des royaumes berbères, selon des auteurs de l’époque. Des tables de Juba et de son fils Ptolémée, rois de Maurétanie, furent vendues à des prix très élevés. Pline releva qu’«il n’y a pas de racines mieux veinées que celles de thuya, et qu’il n’y a aucun bois dont on fasse des objets précieux». A Rome, des tables fabriquées avec le bois de thuya se vendirent entre 200.000 et 300.000 F, selon la même revue.

Un végétal robuste et résistant

Le thuya est donc connu depuis la haute antiquité. Le naturaliste grec Théophraste en donne une description dans son Histoire des plantes sous les noms de Thyon ou de thyia. Homère en parle aussi dans son Odyssée en écrivant qu’«un grand feu brûlait au foyer, l’odeur du cèdre et du thuya qui se consumaient se répandant loin dans toute l’île».

Le thuya «jouait également un grand rôle dans la construction des élégantes maisons mauresques» en Algérie, notait Léon Rosny dans une notice sur le thuya de Barbarie (1856). En fait, le choix du thuya dans la construction des douerate et des maisons de La Casbah d’Alger était imposé par la robustesse et la résistance de ce végétal aux mites, au pourrissement et à l’eau. Des rondins exposés jour et nuit aux intempéries, à des climats changeants depuis des siècles n’ont rien perdu de leur vigueur aujourd’hui.

Le thuya, arbre de Berbérie, dispose d’une longue allée au Jardin d’essai d’Alger. Il existe principalement en Algérie, au Maroc et en Tunisie. Il couvre dans ces trois pays une superficie totale de un million d’hectares, dont 143.000 à 160.000 en Algérie. Ses feuilles conservent leur couleur verte toute l’année. Il peut vivre dans des endroits semi-arides, très pauvres en eau. Il pousse sur des terres situées entre le niveau de la mer et 1.800 m d’altitude. Et sa durée de vie peut atteindre 700 ans, selon des botanistes.

Le thuya joue un grand rôle aussi dans la protection contre l’érosion, particulièrement dans les zones montagneuses. C’est un conifère médicinal. Le navigateur français, Jacques Cartier, et ses compagnons auraient été guéris du scorbut au XVIe par des Amérindiens, grâce à une tisane à base de thuya.

AREZKI MOHAMED HIMEUR.

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