Responsables et experts s’accordent à dire que l’émergence d’une véritable industrie automobile en Algérie passe, au préalable, par le développement d’un tissu industriel dédié à la fabrication de pièces de rechange.
Le gouvernement a prévu, pour cela, une série d’incitations économiques et fiscales pour attirer davantage d’investisseurs et faciliter l’émergence de cette filière. L’objectif est non seulement de répondre aux besoins du marché local, mais également de réduire la dépendance aux importations et d’encourager l’exportation à moyen terme.
L’Algérie attire de plus en plus les regards des grandes marques automobiles internationales. Treize entreprises de renommée mondiale sont actuellement en pourparlers avec le ministère de l’Industrie pour lancer des projets de fabrication de véhicules dans le pays.
Selon le conseiller auprès du ministre de l’Industrie, Billal Lemita, le constructeur sud-coréen Hyundai, qui fait partie de ces entreprises, s’est déjà engagé officiellement en signant un protocole d’accord avec les autorités algériennes. Cet engagement prévoit un accompagnement immédiat des fabricants de pièces détachées dans le but de poser les fondations d’un écosystème industriel solide et autonome.
Ce regain d’intérêt des grandes marques s’inscrit dans une politique nationale ambitieuse visant à faire de l’Algérie un acteur majeur du secteur automobile en Afrique du Nord.
L’objectif n’est plus seulement l’assemblage local de véhicules, mais la construction d’une véritable industrie intégrée, allant de la fabrication de composants jusqu’à l’exportation potentielle.
Le conseiller du ministre a, d’ailleurs, précisé que l’Algérie a besoin de pas moins de 500 entreprises spécialisées dans la fabrication de pièces de rechange pour accompagner cette dynamique industrielle. Actuellement, le pays ne compte que 120 unités actives dans ce domaine, ce qui représente un déficit considérable.
Un besoin de 500 entreprises de pièces détachées
Cela dit, le ministre de l’Industrie, Sidi Ghrieb, veille sur l’accélération de la mise en œuvre de ce plan, conformément aux instructions du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, qui a ordonné le développement d’un tissu industriel, à élever le taux d’intégration nationale, à créer de la richesse et de nouveaux emplois.
Un tel objectif stratégique exige, néanmoins, la signature de partenariats gagnant-gagnant avec des investisseurs nationaux et étrangers et un transfert de technologie et de savoir-faire.
C’est en exécution de ce programme que Ghrieb a reçu, mercredi dernier, une délégation du groupe international APTIV, spécialisé dans la fabrication de câbles électriques pour automobiles, en vue d’examiner un projet de création d’une usine de production de faisceaux de câbles électriques en Algérie, en partenariat avec un industriel algérien, a indiqué un communiqué du ministère.
Selon le ministre, ce projet constitue «une étape essentielle pour le développement d’une industrie automobile locale, en favorisant la fabrication locale de composants, au lieu de les importer et en créant un environnement concurrentiel propice à l’investissement et au transfert de technologie».
Sifi Ghrieb a également insisté sur la nécessité d’«accroître progressivement les capacités de production, dans l’objectif d’asseoir une industrie mécanique compétitive et durable, capable de répondre aux besoins du marché national, tout en ouvrant les perspectives d’exportation».
Il a, par ailleurs, mis l’accent sur l’importance de renforcer le réseau national de sous-traitance et de développer les compétences locales dans le secteur de l’industrie mécanique.
Dans le cadre du développement du tissu industriel précédant le lancement d’une véritable industrie automobile, un nouveau partenariat entre une entreprise algérienne et une autre chinoise pour la création d’une joint-venture (GIS) dédiée à la production de pièces détachées automobiles a été également paraphé.
Il s’agit de la signature d’un protocole d’accord préliminaire entre l’EPE Anabib SPA, filiale de la Société nationale de sidérurgie (holding SNS), et Auto Lumière SARL, une entreprise chinoise spécialisée dans la fabrication de pièces détachées automobiles.
Selon le communiqué du holding SNS, cette entreprise serait spécialisée dans le moulage par injection pour produire des composants précis et de haute qualité, la fabrication des feux automobiles, tels que des feux tricolores et les feux unicolores, la fabrication de pare-chocs et autres pièces en plastique pour véhicules… Le partenaire chinois serait déjà présent en Algérie.
Il faut préciser que ce nouvel accord prouve, si besoin est, la ferme volonté des pouvoirs publics de relancer la production nationale de pièces détachées automobiles.
Réseau national de la pièce détachée et Bureau vert
Le ministère de l’Industrie continue de susciter la création de ces partenariats et supervise leur aboutissement pour que naisse un vrai tissu industriel qui approvisionnera l’industrie automobile.
La stratégie qu’il a adoptée consiste à, entre autres objectifs, mettre en place un réseau national de la pièce détachée pour véhicules et automobiles, déjà lancé le 22 février dernier.
Il le réseau regroupe tous les producteurs locaux afin de développer cette industrie et d’accompagner le secteur de la construction automobile en Algérie à travers l’augmentation du taux d’intégration nationale.
Dans une première phase, un recensement national de tous les producteurs locaux de pièces détachées automobiles devrait être réalisé afin d’établir une cartographie complète du réseau de fabricants. Cette démarche vise à structurer le réseau autour de deux dimensions principales : l’aspect technique, lié aux caractéristiques des pièces détachées et organisationnel et structurel afin d’assurer une coordination efficace et un travail collaboratif entre les acteurs du secteur.
L’une des priorités majeures de ce réseau sera le contrôle et la certification des pièces détachées, à travers des procédures d’homologation et de certification de conformité. L’objectif est d’assurer la qualité et la conformité des pièces aux exigences des constructeurs automobiles, qu’ils soient déjà présents en Algérie ou potentiels investisseurs dans le secteur. À cet effet, le réseau s’appuiera sur les organismes et experts nationaux et internationaux.
Dans son intervention, Ghrieb a précisé que la création de ce réseau s’inscrit dans les directives du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, visant à encourager les opérateurs économiques et industriels à investir dans la sous-traitance automobile, notamment dans la production de pièces détachées, en raison du fort potentiel de l’Algérie dans ce domaine.
Le ministre a également réaffirmé l’engagement du ministère de l’Industrie à accompagner les acteurs du secteur, annonçant la mise en place d’un Bureau vert au sein du ministère. Cet organe aura pour mission de suivre en temps réel les projets industriels structurants, notamment ceux liés à la fabrication de pièces détachées.
Ghrieb a souligné que le développement de l’industrie des pièces détachées constitue un socle essentiel pour le véritable essor de l’industrie automobile en Algérie. Il a également invité les start-up à s’impliquer activement dans cette dynamique afin de favoriser l’innovation et la compétitivité dans le secteur.
L’autre action et non des moindres accomplie par le département de Ghrieb a trait à l’installation, le 1er mars dernier, de deux commissions chargées du suivi et de l’encadrement de l’activité de fabrication des pièces de rechange automobiles et de l’intégration industrielle liée à ce domaine dans le cadre du lancement d’un réseau national dédié aux pièces de rechange automobiles.
Deux commissions de suivi et d’encadrement de l’activité de fabrication des pièces de rechange
La commission d’orientation est chargée de l’élaboration de la stratégie générale de cette activité et de la coordination entre les différents acteurs du secteur.
La commission des études et de l’ingénierie, quant à elle, s’occupe des aspects techniques, notamment des normes de qualité et des standards techniques des pièces de rechange, ainsi que du soutien technique et de la formation des fabricants locaux.
Ces deux commissions contribueront également à la définition d’une méthodologie de calcul du taux d’intégration nationale dans la fabrication des pièces détachées et des véhicules, en établissant des critères précis et transparents prenant en compte la part de chaque composant local dans la chaîne de production.
Le ministre a souligné que cette initiative s’inscrit dans l’engagement du ministère à soutenir les opérateurs économiques et à accompagner leurs projets, notamment à travers le Bureau Vert, qui sera dédié au développement et au partenariat industriel, au suivi des projets structurants et à la résolution des obstacles administratifs et techniques rencontrés.
Pour le ministre de l’Industrie, l’augmentation du taux d’intégration nationale dans l’industrie automobile est la clé du développement du secteur mécanique en Algérie, permettant ainsi de réduire la dépendance aux importations, d’encourager la production locale et de stimuler l’investissement et les partenariats dans ce domaine stratégique.
K. B.