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Alger, le musée lapidaire de la place des Martyrs

 

Il se trouve dans l’enceinte de la station de métro de la place des Martyrs, à La Basse-Casbah d’Alger. Il abrite des photographies du site archéologique et des répliques d’une infime partie, des objets découverts lors du creusement du tunnel et de la construction de la station en question. Il donne un aperçu de ce que renfermera le futur grand musée prévu au même endroit.

Une soixantaine d’archéologues ont participé aux fouilles effectuées entre 1994 et 2004 et entre 2013 et 2015. Ils ont déterré un pavement en mosaïque d’une villa de l’époque romaine. Cette bâtisse est enfouie à 60 mètres de profondeur, bien au-delà de celle du tunnel du métro situé à 34 m sous terre seulement. Ils ont mis en évidence aussi, au niveau des différentes strates du site, des bouts de poterie, des fragments de céramique et d’autres vestiges des différents envahisseurs qui ont jeté l’ancre, pendant des siècles pour certains d’entre eux, en face de la baie d’Alger.

Les premiers seraient des compagnons d’Hercule. Ils étaient vingt. Ils avaient faussé compagnie à leur chef pour y créer un petit hameau. Ils lui ont donné comme nom Eikosi, qui signifie vingt en grec. Ils ont été suivis par d’autres conquérants, dont les Phéniciens-Carthaginois, les Romains, les Vandales, les Byzantins, les Arabes, les Ottomans et les Français. Chacun d’eux construisit sa propre cité avec et sur les ruines de ses prédécesseurs.

Les fouilles ont duré 27 mois. Elles ont été menées par des équipes multidisciplinaires algériennes et françaises.
«L’urbanisme berbéro-romain est marqué par la découverte de deux rues dallées, les Cardo (…). Vers la fin du IIe siècle, un bâtiment de grande taille, de quelque 440 m2, est implanté entre les deux rues. Il présente deux séries de piliers séparant le vaisseau central des deux côtés. L’ampleur de cet édifice permet de déduire qu’il s’agit d’un bâtiment public. Il présente un immense sol mosaïqué décoré de motifs géométriques, dont la mise en place est datée de la fin du IVe siècle», selon le Centre national de recherches archéologiques d’Alger (01).

Riche gisement historique

Le site archéologique de La Basse-Casbah constitue un riche gisement historique. Les chercheurs ont mis au jour environ 10.000 pièces. Elles ont été réenfouies au même endroit «après avoir fait l’objet d’un marquage et de protection contre toute éventuelle dégradation pouvant survenir lors de la réalisation de la nouvelle station de métro», dira l’un des chercheurs, Kamel Stiti (02).

En fait, la place des Martyrs, plus tôt l’ensemble de
La Basse-Casbah, ne semble pas avoir livré tous ses secrets. Elle doit renfermer encore dans ses entrailles un véritable trésor archéologique. Les vestiges mis au jour retracent le séjour de différents conquérants et civilisations dans le bas-côté du Vieil Alger. La partie qui abrite le gros des découvertes est isolée, à l’aide d’un mur, de la station de métro. Ce rempart sera détruit une fois les travaux de réalisation du futur musée achevés.

«Il reste beaucoup à faire pour mettre au grand jour les trésors archéologiques enfouis sous les rues et les bâtiments de La Basse-Casbah. Chaque artère et chaque bâtisse du quartier furent édifiées sur des vestiges amoncelés, entassés les uns sur les autres depuis la période punique (Phéniciens-Carthaginois) jusqu’à la colonisation française. Comme le confirmèrent les vestiges mis au jour aux 19e et 20e siècles.»

 Lors de la construction, en 1952, de l’actuel bâtiment du Trésor, situé dans l’avenue du 1er Novembre 1954, des vestiges antiques furent mis au jour presque au même endroit où on découvrit 158 pièces de monnaie en 1940. Les chercheurs mirent également en évidence un puits «fort bien construit» de 12 m de profondeur, d’où ils retirèrent une importante quantité de poteries datant des XIIe et XIIIe siècles, trouvée à environ deux mètres de profondeur. Les objets retirés du fond du puits datent de la période romaine. Une inscription du temps de Septime Sévère fut découverte et entreposée au Musée des antiquités.

«En 1837, les premières fouilles menées dans La Basse-Casbah s’achevèrent par la découverte de plusieurs voies romaines, enfouies parfois à une dizaine de mètres de profondeur. D’autres firent sortir des ténèbres, près de la mosquée Ali Bitchin, les bagnes romains enterrés à plus de dix mètres de profondeur, et des thermes dont la présence fut révélée par la découverte d’un hypocauste.» (03).

Alger, belle et ancienne

Le géographe et historien arabo-andalou, Abou Obeid Abdellah El-Bekri, qui séjourna à Alger au temps où cette ville se trouvait sous le règne de la tribu berbère des Beni Mezghenna (Senhadja), fut subjugué par sa beauté. Et il le mentionna dans ses écrits. «Ville belle et ancienne, qui renferme de magnifiques monuments d’antiquité et des portiques d’une construction parfaite», écrivait-il (04).
  Cette «grande» cité renfermait également des voûtes solidement bâties, qui démontrent qu’à une époque reculée, elle avait été la capitale d’un empire. On y remarque un théâtre, dont l’intérieur est paré de petites pierres de diverses couleurs, qui forment une espèce de mosaïque. Dans cet édifice, on voit les images de plusieurs animaux, parfaitement travaillées et façonnées d’une manière si solide que pendant une longue série de siècles, elles ont résisté à toutes les injures du temps», soulignait-il dans un ouvrage cité dans Raconte-moi Alger (05).
 El-Bekri était allé dans le détail en relevant que la cité des Beni-Mezghenna abritait
«plusieurs bazars et une mosquée. Elle possédait autrefois une vaste église dont il ne reste qu’une muraille de forme d’abside se dirigeant de l’est à l’ouest».

D’autres vestiges ont été découverts également dans la périphérie d’Alger au 19e siècle et plus tard : des dolmens sur les deux parois d’un profond ravin à Beni-Messous et une grotte préhistorique renfermant des ossements d’animaux, des aiguiseurs, etc. au lieu-dit Grand Rocher, près de l’entrée Est d’Aïn Benian, à l’ouest d’Alger.

Dès les premiers coups de pioche du chantier de construction de la station de métro de la place des Martyrs, à La Basse-Casbah, des vestiges sont apparus à environ deux mètres du sol. Ils sont attribués aux Ottomans. Ils ont été trouvés sous les fondations de la maison du marquis de la Tour-du-Pin.

Ce bâtiment fut édifié en 1837 sur l’emplacement occupé auparavant par la mosquée Es-Sayida, ravagée par un incendie. Les premier et deuxième étages de la bâtisse furent transformés en hôtel portant le nom de l’Hôtel de la Régence.

Les ruines sont protégées par une clôture de grillage en fil de fer. Des panneaux installés autour du site fournissent quelques renseignements sur l’histoire de la ville d’Alger depuis les Phéniciens jusqu’à l’invasion française de l’Algérie. Des vestiges plus anciens ont été mis à jour auparavant dans différents points du quartier de la Marine.

M. A. H.

Sources :

(01)   – El Watan, 6 février 2016

(02)   – APS 19 mars 2018

(03)   – Raconte-moi Alger, Mohamed Arezki Himeur, ANEP-Editions, 2017.

(04)   – Revue Africaine, mars 1861

(05)   – Description de l’Afrique septentrionale, El Bakri, traduite par Mac Guckin de Slane, édit. Typographie Adolphe Jourdan, Alger, 1913).

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